Chapitre VI

Le travail du nœud

La plupart des tentatives faites jusqu’à présent pour élucider les problèmes du nœud s’attachaient à ce que l’on appelle la variété des objets, telle que nous la livre l’espace complémentaire autour des réalisations faites de cordes, et s’efforçaient de classer ces variétés de dimension trois. Lors même qu’elles renonçaient à la classification, elles se fondaient encore sur ces plongements, avec les surfaces de Seifert, par exemple.

Nous sommes seuls à avoir tenu compte de quelque chose d’autre relevé dans ce qui occupe Lacan avec hésitation et fermeté dans ces périodes plus anciennes : pour nous, entre le plongement et les résultats auxquels parvient notre étude, il faut insérer un nouveau matériel nodal, les surfaces d’empans orientées par morceaux, ou les coloriages, que met en évidence notre procédé de lecture. C’est à partir de ces coloriages dans la présentation minimum des cas alternables de un à trois ronds — avec une inversion dans les cas non alternables — et non à partir des variétés que nous cherchons la solution.

De là vient qu’un nouveau travail s’impose à nous. Nous devons chercher quelles sont les relations entre les différentes parties, coupure et non-coupure, plus précisément entre leurs composants, dans les présentations minimum des cas alternables de un à trois ronds d’abord et examiner le mode de composition par lequel celles-ci sont montées avec celles-là, sans oublier les cas non alternables et le fait du plongement.

Les présentations minimales des mises à plat et les plongements nodaux nous apparaissent comme deux registres des mêmes faits en deux réalisations différentes; ou mieux la présentation minimale nous apparaît comme une description graphique, en rapport avec la dimension deux, des plongements nodaux en dimension trois, dans un autre mode d’inscription, dont nous ne pourrons connaître les traits et l’algèbre que quand nous aurons comparé la transcription et le plongement.

Je me saisis des plongements d’une manière intuitive dès qu’ils sont dessinés. La présentation minimale du nœud alternable est trouvée de manière heuristique. Ses traits doivent être successivement déterminés dans la description graphique des présentations alternées, quand elle existe. On se trompera évidemment si on veut lire ces descriptions comme nodales et non selon leur dimension graphique.

Supposons que je regarde l’espace comme possédant des contraintes réduites, il représente un vide dont on perçoit la vastitude et au sein duquel on croit pouvoir se déplacer librement, etc. Je pourrais déclarer que dans cet ensemble, ses différentes parties n’ont pas de qualités propres différentes de l’ensemble.

Je ne jugerai exactement l’espace que lorsque je renoncerai à apprécier ainsi le tout et les parties. Je m’efforcerai de remplacer chaque description graphique par un nœud ou par une chaîne qui, pour une raison résumée dans les mouvements de Reidemeister, peut être représentée par cette présentation graphique. Ainsi articulées, les présentations ne seront plus dépourvues de dimension nodale, mais pourront expliciter quelque nœud ou enlacement.

Le nœud est déterminé par l’espace comme il détermine l’espace, mieux il nous ouvre à des propriétés de l’espace que nous ne saurions imaginer ou concevoir sans lui.

Il nous paraît qu’il n’y a dans l’espace que deux façons de circuler, de passer au travers, à la manière de l’enlacement (chaîne intrinsèque) ou à la manière du nœud.

Comme le formule Lacan : dans l’enlacement, qui fait chaîne, un rond utilise le trou d’un autre rond; dans le nœud aucun des ronds n’use du trou d’un autre rond [2 Sém XXII, leç 15.05.75].

Nos prédécesseurs ont commis la faute de vouloir interpréter l’espace en tant que contenant uniforme. C’est pourquoi il leur apparut multiple et indéterminé.

Le travail graphique du nœud est un travail de composition d’éléments simples entre eux. Il donne une description.

Le travail nodal du nœud est un travail de composition entre eux de mouvements simples. Il donne une topologie.

Dans le registre graphique, il consiste à composer les parties nœuds et les parties non-nœuds des nœuds alternés au moyen d’un instrument, le graphe de Terrasson qui va être défini immédiatement.

Nous rencontrons alors la notion de montage régulier. Un montage régulier est un composé, au moyen d’un emploi spécifique du graphe de Terrasson, de nœuds coupures et de peignes.

Un cas quelconque de nœud ou de chaîne qui n’est pas un montage régulier est un composé, selon le même procédé de montage, procédé dit régulier, de pur-nœud et de non-nœud. Ou, pour le dire autrement, un cas quelconque est obtenu à partir d’un montage régulier par des sections transverses, soit des bretelles de ruban ou des coupures transverses telles que nous en avons traité dans le chapitre précédent et telles que le graphe de Terrasson va nous permettre d’en préciser la définition, effectuées respectivement dans les parties nœuds et les parties non-nœuds du montage régulier.

Dans le registre nodal, le travail consiste en l’action des mouvement gordiens propres (les homotopies) et impropres sur les non-nœuds qui représentent les différents états des enlacements. Il donne lieu à un chiffrage de la partie coupure qui se révèle correspondre au chiffre du nouage et de la partie non-coupure contenant le chiffrage des enlacements, sous l’aspect du non-nœud contenu, pour un coloriage particulier.

C’est à partir d’ici qu’un coloriage unique peut être assigné à chaque présentation de chaîne contenant de l’enlacement. Il s’agit du coloriage qui correspond au non-nœud contenu muni de son coloriage sans coupure. Les nœuds propres pour leur part ne contiennent pas de non-nœuds mais ils n’ont qu’un coloriage à une inversion des couleurs près. Les chaînœuds auront plusieurs coupures, mais elles ont le même chiffre.

Ainsi pourrons-nous parler de l’unicité du nombre de la coupure, résolvant définitivement le problème de la variation de la coupure, soit de l’emploi de l’orientation des objets par la caractéristique des croisements, approchant ainsi la solution que nous voulons donner au traitement des enlacements dans la suite de cet ouvrage. Nous la préciserons dans le dernier chapitre.

I. Description graphique

0. Le graphe de Terrasson

a1 - Définition

Dans un schéma plat donné, nous marquons par des points de pleins (points noirs) et des points de vides (points blancs) les zones distinguées par le chiffrage du premier temps de notre algorithme. Rappelons que ce premier temps de l’algorithme aboutissait à la distinction de zones dites pleines et de zones dites vides. Ces points sont les sommets du graphe de Terrasson. En maintenant la distinction établie entre ces sommets, nous les joignons par des arêtes qui traversent, de manière franche en leur parcours, chaque fraction d’arc adjacente à chaque zone.

Fig. 1

Nous obtenons ainsi le graphe de Terrasson de la présentation donnée.

Fig. 2

Chaque arête joint ainsi un point noir à un point blanc. Le graphe de Terrasson est un graphe de valence paire (nombre pair de sommets) qui présente une alternance de sommets pleins et de sommets vides que nous rendons respectivement par ces points noirs et ces points blancs.

Il nous arrivera aussi d’appeler T-graphe ce type de graphe associé à une présentation.

L’ensemble des sommets de ce nouveau graphe est la réunion des ensembles de sommets des deux graphes, duaux l’un de l’autre, le graphe des pleins et le graphe des vides. Nous les avons définis au chapitre IV et donnons ici les exemplaires attachés à cette présentation d’une 2-chaîne qui nous sert d’exemple.

Fig. 3

Il est bien certain que le lecteur peut rencontrer des difficultés dans la distinction de ces trois différents graphes qui présentent des éléments communs. C’est le cas du T-graphe puisque nous prenons en compte pour former ce dernier l’ensemble des sommets respectifs de ces deux graphes. Dans le T-graphe, nous continuons à distinguer leurs sommets respectifs comme points de pleins et points de vides.

Mais ce n’est pas le cas de ces deux graphes, le graphe des pleins et le graphe des vides. Ils sont disjoints — ils n’ont aucun élément commun, et sont duaux l’un de l’autre (voir chapitre IV).

Dans ces trois graphes, les arêtes sont toujours différentes.

Le graphe de Terrasson n’est pas un composé du graphe des pleins et du graphe des vides.

Dans la suite de notre étude, nous utilisons principalement des sous-graphes de ce graphe de Terrasson. Voici des exemples lorsque la surface d’empan est seulement déterminée par le premier temps de notre algorithme, avant d’être colorée.

Fig. 4

Voici d’autres exemples lorsque la surface d’empan est colorée par les autres temps de notre algorithme.

Fig. 5

Ces portions de graphes nous servirons à composer et décomposer les présentations de nœuds ou de chaînes. Elles nous servirons aussi à effectuer des transformations sur les présentations d’objets. Ceci se fait en tenant toujours compte de l’existence des coloriages éventuels de l’objet.

Ce graphe et sa logique nous serviront à préciser les définitions de ce que nous accomplissons avec ces présentations, à montrer l’unité parfois surprenante des gestes à effectuer selon la nécessité produite par ces objets, et à acquérir une plus grande sûreté dans la pratique des schémas plats.

a2 - Les poinçons

Un poinçon est délimité par un cycle du graphe de Terrasson dans la présentation d’un objet. Ce cycle est le bord du poinçon.

Dans l’exemple de la chaîne borroméenne, nous pouvons décomposer celle-ci en deux parties par un cycle qui sépare en deux poinçons. Une présentation colorée quelconque peut être décomposée en sa partie coupure et sa partie non-coupure. Chacune de ces parties peut être formée de plusieurs composantes. Nous donnons ici un exemple où la partie coupure et la partie non-coupure ne sont constituées que d’un seul composant chacune.

Fig.6

Un composant de la partie où passe la coupure peut être présenté dans son poinçon par déformation sur la sphère. Nous obtenons l’objet poinçon délimité par son bord extrait du graphe de Terrasson.

Fig.7

Les poinçons présentent toujours un nombre pair de sommets où alternent les sommets de pleins (points noirs) et les sommets de vides (points blancs). Ici nos deux exemples montrent la présence de six-poinçons, la caractéristique du poinçon étant donnée par le nombre de sommets qui égale le nombre d’arêtes du bord du poinçon.

Le poinçon est un objet qui généralise la notion d’enchevêtrement (tangle) bien connue depuis Conway qui l’a intégré à un calcul [18. b, pp. 59-69], malheureusement trop restreint pour couvrir la multiplicité des chaînes et des nœuds. La fermeture des tangles présente aussi une difficulté qui sera résolue plus loin par notre description graphique1.

Le 4-poinçon

Le 4-poinçon présente deux sommets de vide et deux sommets de plein. C’est le plus petit poinçon que nous aurons à considérer dans le travail du nœud.

Il est à noter qu’à l’extrême de sa décomposition par le graphe de Terrasson, un nœud est constitué de 4-poinçons cernant chacun un croisement.

Lorsque nous distinguons les pleins et les vides, il y a deux types de 4-poinçons ne contenant qu’un croisement. Remarquons que la torsion, dépendant de l’opposition des pleins et des vides, est ici produite par les sommets du bord du poinçon.

Fig. 8

Avec le coloriage qui tient compte de la caractéristique des croisements, il y a quatre types de 4-poinçons élémentaires :

Fig. 9

Ces différents types de croisements, maintenant cernés par un poinçon, ont déjà été étudiés au chapitre 3.

Toujours par le 4-poinçon, nous pouvons recourir à d’autres décompositions séparant un agrégat de croisements plus nombreux.

Ce nœud 63 peut-être divisé en deux 4-poinçons par un cycle extrait de son T-graphe.

Fig. 10

Nous voyons bien ici que les parties coupure et non-coupure de l’objet sont délimitées par des cycles du graphe de Terrasson.

Or nous pouvons recourir à des 2n-poinçons pour un nombre entier n quelconque.

Les 2n-poinçons

Un 2n-poinçon est délimité par un cycle du T-graphe présentant n sommets de plein et n sommets de vide.

Reprenons la présentation de l’objet que nous donnions en exemple :

Fig. 11

Elle se décompose en deux 6-poinçons contenant respectivement la partie non-coupure et la partie coupure :

Fig. 12

Le nombre 2n, qui désigne ce genre d’objet, est donné par le nombre de sommets porté par le cycle qui fait bord au poinçon. C’est la définition de ce genre d’objet.

La présentation du second poinçon est différente de celle du premier.

Dans le premier cas, la zone extérieure au poinçon, délimitée par son bord extrait du T-graphe, contient le point à l’infini du plan.

Dans le second cas, ce point à l’infini est dans le poinçon.

Mais cette différence ne persiste que si nous considérons nos dessins tracés sur le plan infini (l’intérieur du disque), elle disparaît comme différence si nous considérons nos dessins tracés sur la sphère (le plan achevé), dont bien sûr nous ne regardons qu’une localité. C’est la question que nous avons déjà rencontrée et traitée à l’occasion de la dualité des surfaces d’empan et des présentations duales au chapitre IV.

Par une sorte de changement de présentation topologique d’ordre nul sur la sphère — que nous appellerons le retournement du poinçon — nous retrouvons la présentation du poinçon que nous donnions plus haut :

Fig.13

Cette transformation qui retourne les poinçons est nécessaire à la composition que nous allons étudier maintenant. La présentation des 2n-poinçons étant terminée, nous pouvons apprendre à les composer entre eux.

1. Les modes de composition

Nous avons déjà rencontré un mode de composition au chapitre IV lorsqu’il nous a paru nécessaire de fabriquer le composé S1 # S2–1 # S2 comme (S1 # S2–1) # S2 ou comme S1 # (S2–1 # S2) afin de démontrer l’implication réciproque de deux relations binaires.

 Fig. 14

Nous voulons ici situer, parmi d’autres modes comparables, et définir, plus rigoureusement, ce mode de composition qui raccorde les différents ronds de deux chaînes par des rubans. Nous notions cette composition par le caractère # (dièse) dans cet exemple.

Nous adjoignons, maintenant, à ce caractère, un chiffre #n qui précise le degré de la connexion entre les deux objets. Il s’agit donc de #4 dans notre exemple, (S1 #4 S2–1) #4 S2. Cet indice correspond au nombre de rubans employés dans ce mode de composition particulier. Il ne sera pas toujours possible de se référer au nombre de rubans pour définir le degré d’une telle composition et nous le définissons donc par un autre biais.

Certes, sans prétendre obtenir une structure algébrique bien connue, comme un groupoïde, un groupe ou un anneau, voire un corps, nous étendons ce type de composition ici puisque nous voulons préciser la structure topologique propre à ces objets.

Ces structures algébriques standard sont issues de la théorie des nombres et de la géométrie pour le rôle éminent qu’y joue la structure de groupe; nous nous sommes expliqué là-dessus dans un ouvrage précédent2. Lorsque nous parlons de structure topologique, c’est bien dans le fil de ces structures algébriques que nous nous plaçons, disons en termes de catégories.

Nous retrouverons plus loin cette composition de deux objets par plusieurs rubans afin de définir une relation entre les objets.

Nous voulons donner une définition plus précise de ce mode de composition et montrer vers quels modes plus généraux il ouvre.

a0 - Définition de la composition

Nous réalisons nos montages en suivant des sous-graphes du graphe de Terrasson de chacun des objets à composer. Il s’agit de produire des éléments composables en s’appuyant sur les arêtes et les sommets du T-graphe et en pratiquant deux ouvertures et un retournement de poinçons à partir de ces composants. La composition se fait toujours selon un arbre prélevé dans le T-graphe de chaque composant. Un arbre est un graphe dont la suppression d’une quelconque de ses arêtes le sépare en deux composants non connexes. La composition obtenue se fait toujours selon un cycle du T-graphe de l’objet composé. Un cycle est un chemin fermé.

Donnons un exemple avec la composition de ces deux objets.

Fig. 15

Détermination des caractéristiques de la composition

Nous choisissons parmi les graphes de Terrasson de chacun des objets à composer, un sous-graphe connexe. Ce sous-graphe doit être un arbre, comme nous venons de le dire.

Fig. 16

Dans l’exemple que nous choisissons ici, nous avons deux cas extrêmes d’arbres. Il s’agit d’arbres en étoiles autour d’un point unique qui représentent des cas particuliers.

Ces sous-graphes doivent présenter un même nombre d’arêtes. Ce nombre n définit le degré de la composition. Ici, n est égal à 3. Nous parlerons alors de la 3-composition, et d’une manière plus générale de la n-composition.

La forme respective de chaque sous-graphe, noté x et x’, spécifie le mode de composition. Nous notons indifféremment le nœud S accompagné de x avant ou après la lettre qui désigne l’objet S en question, selon sa place dans la composition des deux objets :

S x #n x’ S’

Ici, le premier sous-graphe est un sous-graphe en étoile autour d’un sommet de plein, nous le notons p. Le second est un sous-graphe en étoile autour d’un sommet de vide, nous le notons v. Nous notons donc la composition que nous effectuons maintenant :

S p #n v S’

Ouverture des poinçons

Nous ouvrons les poinçons en dédoublant les arêtes et en démultipliant les sommets intermédiaires. Les sommets comme extrémités des arêtes restent inchangés.

Fig.17

Faisons la même chose avec l’autre objet à composer :

Fig. 18

Nous obtenons deux 2n-poinçons. Ici des 6-poinçons.

Retournement d’un poinçon

Il faut retourner un de ces poinçons, par une déformation continue sur la sphère, afin que l’un d’entre eux se présente de manière propre à être placé dans la zone ouverte de l’autre.

Fig. 19

Pour traiter de ce retournement, il suffit de se reporter au chapitre IV, lorsque nous traitons de la dualité des présentations sur la sphère3.

Composition proprement dite des deux poinçons

Nous pouvons ainsi emboîter ces deux objets l’un avec l’autre à rotation près, en respectant les pleins et les vides et les coloriages de chacun d’eux, s’il y a lieu.

Fig. 20

Cette composition se fait bien selon un cycle du T-graphe de l’objet composé.

À retirer ce cycle, nous avons construit l’objet noté Sp #3 v S’ :

Fig. 21

Cet objet est encore un nœud ou une chaîne, il s’agit bien d’un mode de composition interne à la multiplicité de ces objets.

Ayant défini la composition dans sa forme la plus générale, en nous aidant d’un exemple, considérons maintenant des cas particuliers de ces modes de composition afin de retrouver les montages intuitifs que nous pratiquions déjà. Nous spécifierons ensuite un mode de montage principal pour la description de tous les objets à partir des objets constituant la source de cette description. Ces éléments générateurs ont été présentés au chapitre précédent. Ce sont les nœuds coupures et les peignes, deux familles duales entre elles.

a1 - La 2-composition

La 2-composition est définie grâce à deux arêtes consécutives dans le graphe de Terrasson des objets qui sont montés ensemble. Ces deux arêtes consécutives forment le cas le plus simple d’un arbre en étoile. Au degré deux, il n’y a pas d’autre arbre. Cette portion de graphe présente toujours trois sommets, et dont le sommet médian va nous servir à caractériser la composition, en tant qu’il est un sommet de plein ou un sommet de vide. Au moment de l’ouverture du poinçon, elle donne lieu à un 4-poinçon.

Il y a quatre modes de la 2-composition

La forme générale de la 2-composition étant :

S x #2 x' S’

Il nous arrivera de la noter aussi :

S x2 # x'2 S’

où x2 et x’2 désignent des couples d’arêtes connexes, isolés dans le T-graphe des objets à composer.

Il y a seulement deux types de tels couples pour un objet donné. Ceci explique qu’il n’y ait que quatre modes de 2-composition.

Afin de bien définir ces deux types d’accrochages de chacun des objets, montrons leurs différences sur l’exemple du nœud trèfle. En effet, si nous considérons deux arêtes successives du graphe de Terrasson du nœud trèfle, il n’y a que deux possibilités :

Fig. 22

Dans le premier cas, le sommet intermédiaire entre les deux arêtes du graphe est un sommet de vide. Dans le deuxième cas, le sommet intermédiaire est un sommet de plein.

Dans le cas de la 2-composition, si le sommet intermédiaire est un sommet de vide, nous dirons que la composition se fait de ce côté-là en dérivation. Nous pourrons l’écrire x = d2, pour noter cette dérivation, ou aussi bien x = v2 pour noter le point de vide.

Dans le cas contraire, le sommet est un sommet de plein et nous dirons que la composition se fait alors en série du côté de cet objet. Elle sera notée x = s2 pour le mode en série ou bien x = p2 pour le point de plein médian.

Il est remarquable, dès maintenant, que ces deux modes sont duaux l’un de l’autre; ils s’échangent lors de la dualité de l’objet produit par la composition en question.

Donnons un premier exemple de 2-composition, lorsque les deux objets composés sont montés en dérivation, soit :

S d2 # d2 S’

Une notion intuitive avec précision

Choisissons des objets très élémentaires comme le trèfle T et l’enlacement simple E.

Nous allons donc réaliser le montage :

T d2 # d2 E

Commençons par choisir un 2-graphe qui correspond à ce mode de composition dans chacun de ces deux objets :

Fig. 23

Ouvrons le poinçon du premier objet à composer.

Fig. 24

Nous déformons continûment le nœud ainsi ouvert pour faire apparaître des portions de ruban en jouant de la présentation, sans rien changer du nouage ni de la structure d’ordre de l’objet poinçon le long du cycle qui lui fait bord.

Ouvrons le poinçon du second :

fig6-25.gif (5760 octets)Fig. 25

Retournons ce poinçon pour avoir un poinçon qui se prête à l’effectuation de la composition, et qui entoure l’enlacement.

Fig. 26

Nous déformons également la présentation du poinçon pour faire voir des portions de ruban dans ce type de montage.

Nous sommes maintenant en présence de deux objets qu’il est facile de composer entre eux.

Fig. 27

Il ne reste plus qu’à les composer effectivement,

Fig. 28

pour constater qu’en ayant bien respecté les différents gestes, qui définissent ces modes de composition, nous obtenons une construction qui éclaire, en le définissant avec plus de rigueur, l’exemple de montage intuitif réalisé grâce à des bretelles ou à des rubans d’étoffes.

Fig. 29

À des mouvements de degré zéro près, ces deux présentations montrent le même objet. Elles sont équivalentes.

Fig. 30

Il est important de noter que nous avons présenté la 2-composition, jusqu’ici, avec des surfaces non colorées. Si le montage, le tracé de la portion du graphe de Terrasson que nous utilisons, respecte ces coloriages, en séparant partie nœud et partie non-nœud, les choses peuvent devenir plus précises encore.

Donnons un exemple de 2-composition (S d2 # s2 S’) en partant du trèfle et de son dual.

Deuxième exemple

Prenons donc un nœud de trèfle que nous préparons à être monté par la 2-composition en dérivation Td2 et sa présentation duale inversée quant aux croisements T’ = T*–1 que nous nous apprêtons à monter en série T’s2 :

Fig. 31

C’est à ouvrir les poinçons qui sont ici rétractés sur leurs bords respectifs, ce qui a pour produit les deux arêtes du graphe de Terrasson du nœud de départ, que nous pourrons les composer entre eux.

fig6-32.gif (29837 octets)Fig. 32

Pour cela nous retournons le poinçon de l’un des deux, ici celui du dual du trèfle monté en série.

fig6-33.gif (40211 octets)Fig. 33

Puis nous réalisons le montage le long du cycle de valence quatre, caractéristique de la 2-composition, afin d’obtenir la composition T d2 # s2 T’:

fig6-34.gif (27436 octets)Fig. 34

Après ces deux exemples de 2-composition, qui reste la modalité la plus simple, revenons au cas général.

a2 - La multi-composition

Comme il y a les 2-compositions, qui viennent d’être définies et présentées sur des exemples, il existe de nombreux modes de composition multiple ou multi-composition, notés n-compositions.

Considérons un arbre extrait du diagramme de Terrasson, c’est-à-dire un sous-graphe qui ne comporte pas de cycle. Si cet arbre a un nombre d’arêtes égal à n, nous parlerons d’un n-arbre extrait du graphe de Terrasson.

Ici un trajet de trois arêtes :

 fig6-35.gif (28673 octets)Fig. 35

Cette portion de T-graphe nous fait progresser de la périphérie vers l’intérieur du nœud en un trajet comparable au mouvement du cheval au jeu d’échec.

Cette image est précisément celle que Freud utilise, dès les études sur l’hystérie [1. f], lorsqu’il veut expliquer la façon dont le travail progresse dans l’analyse. C’est à ce moment de son texte qu’il énonce la loi générale établissant l’augmentation de la résistance en fonction inverse de la distance qui sépare le sujet de ce qu’il appelle, à l’époque, le noyau pathogène. Les éléments du matériau que recueille l’analyse sont, dit-il, comme des dossiers disposés en rayon autour de ce noyau. À travers ces rayons, l’avancée se fait selon une progression sur le mode de déplacement du cavalier aux échecs.

Nous ne voulons dire qu’une chose, comme dans le cas du montage de la pulsion, de la libido et du désir, évoqué au chapitre II. Pourquoi ne pas considérer, au départ, que cette présentation de contraintes spatiales est propre à permettre de suivre ce que disent Freud et Lacan de cette autre scène. Ce lieu qu’il faut bien dire, nous ne saurions trouver sans eux et il est bien difficile d’établir ses lois. Qu’il ne s’agisse pas d’un modèle mais de la chose même est une autre question. Pour y répondre, il ne faut pas oublier qu’en termes de nœud nous sommes aussi et encore dans l’avancée exploratrice, même si celle-ci nous permet de commencer à formuler quelques contraintes qui s’imposent en un tel lieu.

Si nous revenons à notre exemple de multi-composition et ouvrons le poinçon défini par le dédoublement des arêtes de cet n-arbre, et de ses points intermédiaires, nous obtenons un 2n-poinçon.

Ici à partir d’un 3-arbre, un 6-poinçon :

fig6-36.gif (26197 octets)Fig. 36

Ce procédé, dans l’exemple d’une 3-composition, nous permet de définir la multi-composition qui peut se développer selon des arborescences diverses, comme généralisation de la 2-composition. Nous parlerons, dans ce cas, d’un n-arbre de la n-composition dont nous donnerons d’autres exemples caractéristiques.

Ouvrons et retournons un tel poinçon :

fig6-37.gif (41011 octets)Fig. 37

Nous obtiendrons en composant ces deux objets produit du même nœud, le poinçon ouvert et le poinçon retourné puis tourné d’un demi-tour, l’exemple d’un nouveau mode de montage :

 

fig6-38.gif (33133 octets)Fig. 38

Il y a deux n-compositions qui vont nous retenir plus particulièrement. Parmi la variété des n-compositions qui suivent la variété des arbres présentant n arêtes, nous retiendrons les deux modes de composition extrêmes qui sont caractérisés par de stricts arbres en étoile.

a3 - Les deux multi-compositions extrêmes

À l’extrême des possibilités de n-composition, il y a comme pour la deux composition, le mode de la n-composition en dérivation et le mode de la n-composition en série.

La n-composition en série est caractérisée par un n-arbre en étoile dont le sommet central est un point de plein. Nous la notons Ssn ou Spn.

La n-composition en dérivation est caractérisée par un n-arbre en étoile dont le sommet central est un point de vide. Nous la notons Sdnou Svn.

 fig6-39.gif (58528 octets)Fig. 39

Le mode de la n-composition en dérivation respecte le coloriage des non-nœuds. Le mode de la n-composition en série respecte le coloriage des pur-nœuds.

fig6-40.gif (42068 octets)Fig. 40

Nous avons déjà utilisé ces modes de composition dans le premier exemple de montage que nous donnions en introduisant cette pratique. Nous les utiliserons afin de parfaire la description, selon le mode des montages réguliers, de la manière dont est bâti un objet quelconque de la théorie.

Ces dessins peuvent être continûment déformés à loisir. La portion de diagramme de Terrasson utilisé a une valeur structurale d’invariance en tant qu’elle définit exactement et souligne, pour la lecture, le mode de composition.

a4 - La composition dans la dualité

Introduisons un résultat effectif de cette partie descriptive.

Nous appelons présentation duale d’un objet donné la présentation obtenue à partir de la présentation de l’objet donné, muni de la surface duale et déformé en sa présentation duale. Remarquons comment la présentation duale d’un objet donné produite par ces modes de composition, réalise alors un montage qui peut être déduit du montage donné. Il s’écrit en marquant d’un astérisque chaque terme de la scription du montage initial.

Nous voulons parler de la distributivité suivante :

(S xn # xn S’)* = (S* xn* # xn* S’*)

À condition de définir entre les portions de graphe de Terrasson qui président au montage une relation de dualité. Nous voulons dire ce qu’est xn* connaissant xn.

Nous évoquerons, à propos de cette propriété de la dualité, la lecture par les Japonais de l’écriture de leur langue, en tant qu’elle est l’occasion d’une double interprétation permanente, ici simplifiée d’un point de vue rhétorique mais transposée entre la voix et le regard.

Donnons des exemples où la relation de xn* à xn est facile à établir. En commençant par la 2-composition, il y a dualité entre la composition en dérivation et la composition en série.

d2*= s2 et s2* = d2

Si nous reprenons l’exemple (T d2 # d2 E),

fig6-41.gif (22658 octets)Fig. 41

Il va s’écrire, si nous notons T* la présentation duale du trèfle T et E* la présentation duale de l’enlacement E :

(T* s2 # s2 E*)

La présentation duale est ainsi obtenu par dualité :

fig6-42.gif (21502 octets)Fig. 42

Et cela peut se montrer à partir des définitions de ces modes de composition :

 fig6-43.gif (77313 octets)Fig. 43

Et donne lieu, sur la figure, à une lecture directe de la dualité, qui est un excellent exercice de double interprétation constante.

L’exemple suivant montre l’autodualité. C’est la question de l’amphichéralité de certains objets.

Si nous reprenons un cas présenté plus haut (T d2 # d2 T*), il donne le nœud 63 de la table classique :

fig6-44.gif (23969 octets)Fig. 44

qui est construit à partir de ces deux composants qui sont deux ouvertures duales du nœud de trèfle :

fig6-45.gif (26674 octets)Fig. 45

Nous obtenons :

(T d2 # s2 T*)* = (T* d2* # s2* T**)

Or nous avançons, sans l’avoir démontré ici, que :

T* d2* = T* s2 et que s2* T** = d2 T

Soit que nous obtiendrions par dualité :

(T* s2 # d2 T)

Le lecteur peut le vérifier par le dessin en passant à la présentation duale et en décomposant l’objet selon le cycle du T-graphe qui sépare les deux parties coupure et non-coupure de l’objet obtenu.

Il est à souligner donc, que dans ce cas, nous obtenons la même chose, à dualité près, moyennant un changement de torsion.

Il faut noter que l’écriture de la composition de deux objets est commutative :

(T* s2 # s2 T) = (T s2 # s2 T*)

Nous nommons autodualité, à une inversion des signes de torsion près, cette situation qui va paraître de moins en moins surprenante dans notre description. Ceci est à comparer avec ce que l’on appelle depuis Tait en anglais, amphicheral knots, dans la littérature traitant du nœud.

Donnons un dernier exemple avec la multi-composition, en reprenant le premier exemple qui montre une 3-composition en série, s3, et une 3-composition en dérivation, d3. Nous les avons définis plus haut et appelés les modes extrêmes de la n-composition.

Ils sont duaux entre eux dans le cas général :

dn*= sn et sn* = dn

fig6-46.gif (74011 octets)Fig. 46

et permettent de pronostiquer facilement la configuration duale d’un tel montage. Ces deux modes extrêmes conjoints en un type de montage d’éléments particuliers, vont nous servir pour avancer dans la description graphique de nos objets. Nous traitons maintenant des montages de toute partie nœud avec une quelconque partie non-nœud.

2. Les montages réguliers

Dans les exemples donnés plus haut, nous pouvons préciser.

Pour un coloriage donné, dans chaque cas, lorsqu’il s’agit exactement de la séparation des composants de la partie coupure et de la partie non-coupure, liées au coloriage, le matériel source de l’objet formant ces parties, provient des pur-nœuds et des non-nœuds.

C’est le cas dans le premier exemple de montage que nous avons donné. Nous avons aussi recomposé le nœud 63, à partir du trèfle et de sa présentation duale inversée lorsque nous avons voulu donner un exemple de deux compositions en suivant un coloriage et la détermination de différentes parties qu’il produit dans un objet donné :

fig6-47.gif (33534 octets)Fig. 47

Ces deux exemples sont des montages qui présentent une régularité. Pour la faire apercevoir au lecteur et formuler sa définition, nous allons définir une classe d’objets.

Nous appellerons montages réguliers les objets de ce type puisqu’ils sont les exemplaires prototypiques de tels montages. Par rapport à cette famille nous pourrons situer n’importe lequel des autres objets dont nous prétendons faire la théorie. Ce sera, à partir de maintenant, la définition de ces objets.

a1 - Définition

Un montage régulier, en tant que nous désignons un objet par ce nom, est un composé de peignes et de nœuds coupures4, en suivant des cycles de T-graphe, de telle manière que les composants sont montés exclusivement selon les modes extrêmes de la n-composition :

(nC dn # sn Pe)

— les nœuds coupures sont composés selon le mode de la n-composition en dérivation. Le graphe est en étoile autour d’un point de vide,

— les peignes sont composés selon le mode de la n-composition en série, le graphe est en étoile autour d’un sommet de plein.

Le nœud 63 est un montage régulier :

fig6-48.gif (25288 octets)Fig. 48

L’autre exemple, le premier que nous donnions de la composition, fig. 11, s’il est monté de manière régulière, n’est pas un montage régulier en tant qu’objet. C’est dire qu’il n’est pas caractéristique du type de montage dont il dépend, il ne fait pas partie de la classe que nous isolons. Nous préciserons plus loin, fig. 80, ce qui le distingue des objets que nous appelons ici montages réguliers.

Donnons un exemple de tels montages réguliers lorsqu’il n’y a qu’un composant aux parties coupure et non-coupure composées régulièrement.

Voici le montage régulier en question :

fig6-49.gif (29599 octets)Fig. 49

En voici les composants, un pour chacune des parties :

fig6-50.gif (32712 octets)Fig. 50

En effet il est décomposé en ses deux parties par un cycle de son T-graphe.

fig6-51.gif (28535 octets)Fig. 51

Un montage régulier forme un objet dont la partie nœud et la partie non-nœud sont strictement isolables comme provenant d’un peigne et d’un nœud coupure.

fig6-52.gif (40534 octets)Fig. 52

Pour le mieux constater, détaillons dans ce cas la procédure de montage. Ouvrons les poinçons placés dans les deux sources.

Tout d’abord, le poinçon en dérivation dans le nœud coupure :

fig6-53.gif (41631 octets)Fig. 53

Puis le poinçon en série dans le peigne :

fig6-54.gif (49598 octets)Fig. 54

Nous retournons un d’entre eux, le non-nœud de la figure ci-dessus :

fig6-55.gif (20249 octets)Fig. 55

Nous le plaçons alors dans l’espace ménagé dans le nœud coupure par l’ouverture du poinçon afin de former le montage régulier recherché :

fig6-56.gif (47623 octets)Fig. 56

Ce montage régulier rend compte du mode de composition des parties nœuds et des parties non-nœuds d’un objet quelconque. Il nous reste à expliquer pour achever cette description des chaînes et des nœuds alternés et non alternés :

— comment les montages réguliers peuvent être compilés grâce à une propriété remarquable pour chaque ordre correspondant au nombre de composants de leur parties nœud et non-nœud;

— comment un objet quelconque est obtenu à partir d’un tel montage;

— inversement, comment nous pouvons toujours trouver le montage régulier correspondant à un objet quelconque coloré par notre algorithme.

Auparavant, donnons encore deux exemples de tels montages réguliers mais lorsqu’il y a plusieurs composants aux parties coupure et non-coupure, montées régulièrement.

D’autres exemples

Prenons d’abord un cas où il y a deux composants à la partie coupure et un composant à la partie non-coupure.

Voici les trois composants :

fig6-57.gif (50069 octets)Fig. 57

Voici le montage régulier en question, il est non-alterné :

fig6-58.gif (30640 octets)Fig. 58

Un montage régulier forme un objet dont les parties nœuds et les parties non-nœuds sont strictement isolables comme des peignes et des nœuds coupures. Il nous servira plus loin fig. 88.

Troisième exemple

Redonnons notre second exemple où il y a un composant de partie coupure et deux composants à la partie non-coupure.

fig6-59.gif (38044 octets)Fig. 59

Détaillons dans ce cas la procédure de montage.

Nous ouvrons les poinçons placés en dérivation dans le nœud coupure, en série dans les deux non-nœuds.

fig6-60.gif (47976 octets)Fig. 60

Nous retournons deux d’entre eux, les non-nœuds de part et d’autre des figures ci-dessus :

fig6-61.gif (17635 octets)Fig. 61

Nous les plaçons alors dans les deux espaces ménagés dans le nœud coupure par l’ouverture des poinçons :

fig6-62.gif (19866 octets)Fig. 62

Et cela afin de former le montage non-alterné régulier recherché.

fig6-63.gif (30250 octets)Fig. 63

Ces montages réguliers rendent compte du mode de composition des parties nœuds et des parties non-nœuds d’un nœud quelconque. Nous allons l’expliquer pour achever cette description des chaînes et des nœuds alternés et non alternés.

Mais auparavant, nous donnons une propriété importante des montages réguliers.

a2 - Propriété remarquable de ces montages

À un montage régulier à deux composants, une partie nœud et une partie non-nœud, correspond une tresse à trois brins, une 3-tresse.

fig6-64.gif (24031 octets)Fig. 64

Ce montage régulier de deux composants peut être présenté en un écheveau qui montre cette correspondance, cet écheveau le présente comme une fermeture circulaire d’une 3-tresse.

fig6-65.gif (35248 octets)Fig. 65

Nous pouvons toujours établir cette correspondance entre un montage régulier de deux composants et une 3-tresse. Il suffit de constater que la définition du montage régulier de ces deux composants nous assure de l’existence de deux points extrêmes qui sont faciles à définir et d’un trajet qui les joint.

fig6-66.gif (25264 octets)Fig. 66

Il existe un point de plein du graphe de Terrasson dans une zone pleine du composant non-nœud, qui n’a pas été utilisé lors du montage du peigne, cette zone pleine est monochrome dans la partie non-nœud.

Il existe un point de vide du graphe de Terrasson dans une zone vide, du morceau nœud coupure, qui n’a pas été mis à contribution lors du montage régulier; cette zone vide est cernée par la coupure de la partie nœud.

Dans le cas présent, nous appellerons cette zone pleine la zone centrale, et la zone vide la zone périphérique.

Les chemins les plus courts, joignant, dans le graphe de Terrasson, le point de la zone pleine centrale au point de la zone périphérique sont toujours de même longueur.

Dans le cas de deux composants, il est fait de trois arêtes.

Il reste à changer de présentation le montage régulier, par des déformations topologiques de degré nul en s’appuyant sur ce fragment de T-graphe.

fig6-67.gif (41269 octets)Fig. 67

Si nous ouvrons ce sous-graphe pour former le bord d’un poinçon, comme nous avons appris à le faire puisque nous le retournions pour former le poinçon, la tresse est alors parfaitement définie, cernée dans ce poinçon, comme un objet réglé.

fig6-68.gif (37208 octets)Fig. 68

Ainsi, afin de former l’écheveau qui fait voir la tresse définie par le montage régulier, il suffit de savoir trouver le point central et le point périphérique. Nous souhaitons que la façon dont nous les avons décrits plus haut suffise au lecteur pour qu’il apprenne à se retrouver dans ces dessins par l’exercice de cette détermination.

Inversement, toute tresse de trois brins refermée de manière circulaire donne un montage régulier fait de deux parties, une partie nœud et une partie non-nœud.

fig6-69.gif (18182 octets)Fig. 69

Ce procédé de construction n’engage pas exactement le nombre de ronds dans le montage régulier produit. Il sera fait de un, deux ou trois ronds maximum.

La fermeture en écheveau n’est pas non plus si stricte, la fermeture de la tresse peut être conçue autrement pour donner les autres présentations de l’objet. Mais l’écheveau est toujours présent à dualité près sur la sphère.

fig6-70.gif (20889 octets)Fig. 70

Ce résultat montré par construction, celle-ci étant toujours effectuable, peut être étendu pour donner lieu à un principe qui fait correspondre le nombre de parties au nombre de brins de la tresse associée.

a3 - Extension à n parties, les n + 1 tresses

Un quelconque montage régulier fait de n-composants correspond à une (n + 1)-tresse.

Nous pouvons faire le même constat lorsque le montage régulier comporte plus de deux parties. Il y a toujours deux parties extrêmes du montage régulier qui permettent de trouver le point central et le point périphérique.

fig6-71.gif (33259 octets)Fig. 71

Il y a toujours deux points (plein ou vide) marquant deux zones de deux composants qui n’ont pas été utilisé par le montage. Nous les appelons parties extrêmes de ce montage. Par exemple, un montage régulier constitué de trois parties correspond à une 4-tresse.

Trois parties composant un montage régulier s’ils sont pris séparément parmi les nœuds coupures et les peignes, représentent six zones spécifiques. Dans chaque peigne il y a deux pleins, et dans chaque nœud coupure il y a deux vides.

Quatre de ces zones servent à monter régulièrement les composants deux à deux, de ce fait deux zones extrêmes ne sont pas utilisées dans le montage. Elles désignent les parties extrêmes. Nous conseillons au lecteur de vérifier cette façon de compter sur un montage effectif de plusieurs parties. Un montage effectif consiste à réaliser un montage à partir des peignes et des nœuds coupures.

Tous les chemins minimum qui joignent les parties extrêmes ont le même nombre d’arêtes. Lorsqu’il y a n composants, les chemins minimum sont de longueur (nombre d’arêtes) n + 1.

Voici une proposition d’un tel chemin dans l’exemple choisi :

fig6-72.gif (36959 octets)Fig. 72

En effet, dans le cas de ce 3-montage, un trajet des plus courts dans le graphe de Terrasson va d’un point extrême à l’autre, présente quatre arêtes et croise nécessairement quatre arcs. Il en va de même par la suite.

Nous avons donc bien à faire à une 4-tresse ici, et dans le cas général d’un n-montage, il s’agira d’une (n + 1)-tresse.

Comme les montages réguliers de n parties alternativement nœuds et non-nœuds sont des (n + 1)-tresses, ils sont susceptibles d’une compilation et d’une description exhaustive pour chaque ordre marqué par ce nombre n.

Donnons dans le tableau de la page suivante quelques exemples de montages réguliers faits de deux parties obtenus par le tressage de trois brins.

Nous laissons pour des études à part de cet ouvrage, la compilation des tresses dans le cas de trois, quatre… n brins, non sans indiquer qu’il faut les mener en s’appuyant sur les groupes de permutations de n objets, notés usuellement Sn, à chaque fois.

Les n-tresses donnent des m-chaînes, comptant m ronds avec m £ n.

Muni de cet objet, le montage régulier, caractéristique du montage qui préside à la construction d’un objet quelconque dont nous faisons la théorie, nous abordons, maintenant, en relation avec cette notion, la description d’un cas général et quelconque de chaîne ou de nœud alterné, avant de généraliser aux cas non alternés.

Mais auparavant, mettons en tableau les premiers montages réguliers obtenus à partir des 3-tresses

for6-1-1.gif (124495 octets)

3. Passage des montages réguliers aux cas quelconques

Dans un cas quelconque, un nœud ou une chaîne est un montage de pur-nœuds et de non-nœuds réalisé selon le mode des montages réguliers que nous venons de définir.

Les pur-nœuds sont composés selon le mode dit en dérivation par l’intermédiaire d’un sous-graphe du T-graphe en étoile autour d’un point de vide. Les non-nœuds sont composés selon le mode dit en série par l’intermédiaire d’un sous-graphe du T-graphe en étoile autour d’un point de plein.

Nous avons établi dans le chapitre précédent qu’un pur-nœud quelconque vient d’un nœud coupure en lui ajoutant des bretelles transverses. De même, nous avons établi qu’un non-nœud quelconque est obtenu à partir d’un peigne en y pratiquant des coupures transverses.

Par conséquent, un cas quelconque de nœud ou de chaîne sera obtenu à partir d’un montage régulier sur lequel nous pratiquons des sections transverses isolables dans ses composants.

a1 - Ajoutons les sections transverses

Reprenons un exemple de montage régulier déjà rencontré et pratiquons quatre sections transverses, deux pour chaque partie.

fig6-73.gif (57884 octets)Fig. 73

Nous modifions sa présentation par des mouvement d’ordre zéro, afin d’obtenir un cas qui présente toute la généralité souhaité d’un objet quelconque.

fig6-74.gif (61408 octets)Fig. 74

Il y a donc une relation dans notre description graphique des objets entre ce montage régulier et ce cas des moins particuliers.

Ainsi, de manière inverse, un objet quelconque pourra toujours être rapporté à un montage régulier. C’est ce que nous voulons montrer maintenant, en commençant par préciser cette relation.

a2 - Formalisons les sections transverses

Les sections transverses dont nous parlons depuis le chapitre précédent peuvent être formalisées graphiquement comme des transformations du graphe de Terrasson.

Les sections transverses sont des ouvertures-fermetures de portions de deux arêtes du T-graphe. Ou pour le dire autrement des inversions modulo un 4-poinçon, au sens que nous allons préciser, de tels couples d’arêtes.

Pour une coupure transverse, le point médian, entre les deux arêtes de départ, est dans ce cas, un sommet de plein.

fig6-75.gif (28028 octets)Fig. 75

L’inversion fait que le point médian du résultat de la transformation est un point de vide.

fig6-76.gif (52286 octets)Fig. 76

Ceci vaut aussi bien pour une bretelle transverse de manière duale :

fig6-77.gif (31983 octets)Fig. 77

Le point médian, entre les deux arêtes de départ, est un sommet de vide. L’inversion du poinçon fait que le point médian du résultat de la transformation est un point de plein. Il s’agit bien de la transformation inverse de la précédente.

fig6-78.gif (46128 octets)Fig. 78

Il y a donc lieu de construire une catégorie des graphes de Terrasson et de leurs transformations.

a3 - Revenons à la description d’un cas quelconque

Par conséquent, un cas quelconque de nœud ou de chaîne sera obtenu à partir d’un montage régulier de multiples composants sur lesquels nous inversons des poinçons.

Dans notre exemple précédent, nous marquons les portions de T-graphe faites de deux arêtes qui vont donner lieu à l’inversion des poinçons.

fig6-79.gif (62790 octets)Fig. 79

Inversons les poinçons comme nous venons de le montrer :

fig6-80.gif (69063 octets)Fig. 80

Nous obtenons ainsi un objet quelconque qui n’a pas la caractéristique des montages réguliers, c’est-à-dire d’être composé exclusivement de nœuds coupures et de peignes. Comme le montage régulier nous montre le mode de composition des parties, dans le cas particulier du peigne et du nœud coupure

Nous pouvons monter les parties coupures, faites de pur-nœuds, avec les parties non-coupures faites de non-nœuds, comme sont composés les nœuds coupures et les peignes composants d’un montage régulier.

fig6-81.gif (55188 octets)Fig. 81

Il s’agit bien du même type de montages que nous avons dit réguliers et qui donne leurs noms aux objets qui les représentent. La description du montage se fait grâce au cycle du graphe de Terrasson.

Nous ouvrons les poinçons de manière comparable, du côté des composants présentant une coupure :

fig6-82.gif (44711 octets)Fig. 82

Nous faisons de même du côté des composants sans coupure.

De plus, ici, nous retournons le bord du poinçon de la même manière :

fig6-83.gif (36329 octets)Fig. 83

Nous montrons ainsi comment un montage régulier donne le principe de montage d’un cas quelconque

Ceci étant établi sur un seul exemple, il nous importe de démontrer que nous pouvons bien passer du montage régulier au cas quelconque par des coupures transverses pour définir la relation graphique qui soutient notre description. Il s’agit de cette relation et de son inverse :

fig6-84.gif (54289 octets)Fig. 84

Si les sections transverses sont pratiquées entre les parties nœuds et non-nœuds du montage régulier, c’est-à-dire qu’elles ne respectent pas les cycles du T-graphe qui séparent ces parties, nous parlerons d’un autre montage. C’est dire qu’il peut y avoir un jeu de sections transverses entre montages réguliers différents. Mais nous savons caractériser les sections qui mettent en correspondance un montage régulier et un objet quelconque.

Ces sections ne traversent pas le cycle qui fait bord des poinçons montés régulièrement.

Dans le sens inverse, ceci nous incite à suivre le raisonnement qui nous assure de toujours trouver le montage régulier correspondant à un cas quelconque :

— puisqu’un objet est toujours décomposable en parties nœuds et non-nœuds;

— que ces parties sont toujours des pur-nœuds et des non-nœuds;

— que ces pur-nœuds et ces non-nœuds sont toujours produits à partir des nœuds coupures et des peignes par des sections transverses. Ceci est démontré au chapitre précédent pour les non-nœuds et vaut de manière duale pour les pur-nœuds.

Nous obtenons alors toujours le montage régulier dont provient un objet en employant les mêmes transformations de manière inverse.

Voici un exemple en prenant toujours le même cas relativement simple (deux parties seulement), mais assez général déjà.

fig6-85.gif (66737 octets)Fig. 85

Nous montrons ainsi comment d’un cas quelconque nous trouvons le montage régulier qui lui correspond et comment un cas quelconque peut toujours être obtenu à partir d’un montage régulier.

Donnons d’autres exemples de cas non alternés

Donnons d’autres exemples de cette relation entre montage régulier et objet quelconque. Où nous voyons que plusieurs montage donnent le même objet à un changement de coloriage près.

Dans le cas d’un montage régulier déjà construit plus haut en exemple fig. 63, il s’agira de bretelles transverses dans la partie nœud :

fig6-86.gif (91792 octets)Fig. 86

Inversement nous pouvons reconstituer le montage régulier dont il s’agit :

fig6-87.gif (77626 octets)Fig. 87

Afin de reconstituer le montage régulier, la partie faite d’un nœud coupure est obtenue à partir d’un pur-nœud quelconque en y pratiquant des coupures transverses.

Et dans le cas de l’autre montage régulier construit plus haut, il s’agit des coupures transverses dans la partie non-nœud qui donne la chaîne non alternée, le nœud du 23 juillet 1993, que nous avons déjà traitée dans les chapitres précédents de cet ouvrage :

fig6-88.gif (91770 octets)Fig. 88

Dans l’autre sens, la partie constituée d’un peigne dans le montage régulier correspondant est obtenu à partir d’un non-nœud quelconque en lui ajoutant des bretelles transverses :

fig6-89.gif (92115 octets)Fig. 89

a4 - Voilà pourquoi il y a de la complication

Voilà pourquoi il y a de la complication dans les nœuds et les chaînes. Nous avons montré que leur richesse et leur complication tient aux coupures transverses et aux bretelles de ruban dans les montages réguliers.

Cette complication empêche que d’une manière générale, un nœud ou une chaîne quelconque puisse être présenté en écheveau comme c’est le cas de ce que nous avons appelé les montages réguliers, là où il n’y a pas de bretelles ni de coupures supplémentaires.

Cette complication empêche que la théorie des chaînes et des nœuds soit directement réductible à la théorie des tresses.

a5 - Les cas non alternables

Les cas désalternés sont obtenus des cas alternés en remplaçant des croisements de la torsion donnée par des croisements de torsion inverse. C’est dire qu’ils suivent les bâtis d’un point de vue graphique.

Ils présentent des propriétés nodales, plastiques et topologiques supplémentaires.

Pour conclure, nous pouvons maintenant répondre à la question relative à la fermeture des tangles que nous posait L. Kauffman à notre domicile, un soir après dîner. Si nous respectons nos coloriages et dans ces conditions nous décomposons les objets selon les cycles de T-graphe qui séparent les parties nœuds et non-nœuds de ces objets, alors il y a toujours une manière de fermer les poinçons obtenus et elle est unique, telle que :

— les parties nœuds se révèlent être des pur-nœuds montés en dérivation (la fermeture du bord du poinçon donne un graphe en étoile autour d’un sommet de vide);

— les parties non-nœuds se révèlent être des non-nœuds montés en série (la fermeture du bord du poinçon donne un graphe en étoile autour d’un sommet de plein).

Cet éclaircissement ayant été apporté dans la description graphique des objets, revenons à notre théorie T0 des enlacements afin de poursuivre le développement du travail plastique, c’est-à-dire nodal, de notre objet.

Ce travail est entièrement défini par les mouvements de la théorie, les mouvements de Reidemeister augmentés des mouvement gordiens impropres et propres (homotopies) présentés au chapitre IV comme un espace de déformation propre aux nœuds et qui les effacent.

Il donne lieu à une description nodale qui a une traduction arithmétique, c’est-à-dire chiffrée, et dont nous voulons discuter des conséquences graphiques dans la lecture des dessins.

Nous passons donc à la deuxième partie de ce chapitre.

II. Plasticité nodale

0. Nouages

a1 - Chiffrage des mouvements

Reprenons l’ensemble E0, défini au chapitre IV, des mouvements de différents types :

TE0 = { B1, B1*, M2, T3, G, H, H* }

en une énumération que nous disposons en tableau, par la suite selon le tableau 1.

Nous définissons une application f de cet ensemble dans l’ensemble numérique {–1, 0, +1},

soit : j : E0 ® {–1, 0, +1}

Cette application attribue à chaque mouvement une valeur numérique, en fonction du nombre de torsion des croisements mis à contribution. Ce chiffrage élémentaire se trouve résumé dans le tableau 2 (voir pages suivantes) qui accompagne le précédent.

Étant donné un changement de présentation $ défini par la série (X1, X2, …, Xi, …, Xn) avec Xi Î E0, nous pourrons définir l’ensemble s des chiffres de la série :

s = { b, b*, t, g, h, h*}

de telle manière que chacun d’eux soient la somme des valeurs des mouvements de chaque type considéré dans TE0.

Aux mouvements M2 correspondent un chiffre nul.

Ainsi :

for6-II-1.gif (14369 octets)

tab6-2-1.gif (119956 octets)

tab6-2-2.gif (120523 octets)

Nous disposons ainsi d’une application F qui fait correspondre à chaque changement de présentation $ un ensemble s de chiffres :

F ($) = s

a2 - Le nombre de nouage

Étant donné deux présentations S1 et S2 de nœud ou de chaîne, équivalentes par la relation R0, c’est dire que l’une est la transformée de l’autre par un changement de présentation $, alors :

S2 = $(S1)

Nous pouvons décrire la moyenne des nombres de coupure S (S2) de l’une comme étant la moyenne des nombres de coupure S (S1) de l’autre, augmenté du nombre de nouage Ns du changement de présentation :

S ($(S1)) = S (S1) + Ns

Pour une surface d’empan donnée, nous avons défini la surface d’empan duale obtenue par un échange des pleins et des vides.

Ainsi nous décrivons de la même manière la moyenne des nombres de coupure duale S*(S’) de l’une en fonction de la moyenne des nombres de coupure duale S*(S) de l’autre, et du nombre de nouage dual N*s du changement de présentation qui les fait se correspondre :

S*($(S1)) = S*(S1) + N*s

Expression du nouage

Étant donné deux présentations S1 et S2 de nœud ou de chaîne dont l’une est la transformée de l’autre par le changement de présentation $ de chiffrage s, le nombre de nouage Ns et son dual N*s s’écrivent :

Ns = b + t + 2 (h + g)

N*s = – b* – t – 2 (h*+ g)

Cette proposition se démontre pour chaque cas élémentaire, à partir de la définition de SS, soit de son expression en termes de nombres de croisement de chaque type, de l’effet des mouvements élémentaires sur les types de croisements et compte tenu du chiffrage de ces mêmes mouvements.

Ainsi :

S ($(S1)) = S (S1) + b + t + 2 (h + g)

S*($(S1)) = S*(S1) – b* – t – 2 (h*+ g)

Chiffrage de notre exemple

Reprenons les deux figures extrêmes de la série de mouvements déjà rencontrée comme exemple au chapitre IV :

 fig6-90.gif (59441 octets)Fig. 90

Il s’agit de la série pondérée en plus et en moins, donnée au chapitre IV :

(+G, + T3, M2, M2, – T3, M2, + T3, + T3, + T3,

– T3, – T3, M2, – B1, + T3, M2, + G, M2, 2 (M2),

2 (– T3), 3 (M2),4 (– T3),2 (M2), + B1, – B1)

L’ensemble s des chiffres vaut ici :

s = { b, b*, t, g, h, h*} = {–1, 0, –4, +2, 0, 0}

D’autre part, nous savons grâce au calcul que :

S (S1) = –2, et que cp = –5.

De la même manière en calculant dans le dual, nous obtenons la valeurde S* (S1) = +3.

Et nous pouvons établir Ns = –1 et N*s = 0, d’après notre proposition et les chiffres de l’ensemble s :

Ns = b + t + 2 (h + g) = –1 + (–4) + 2 (0 + 2) = –1 – 4 + 4 = –1

N*s = – b* – t – 2 (h* + g) = 0 – (– 4) – 2 (0 + 2) = + 4 – 4 = 0

Or pour la chaîne olympique S2, nous avons le chiffrage suivant :

S (S2) = –3 et S* (S2) = +3.

Ainsi nous pouvons vérifier les deux dernières formules :

S (S2) = S (S1) + Ns

–3 = –2 – 1

S*(S2) = S*(S1) + N*s

+3 = +3 + 0

Ce que nous voulions vérifier sur cet exemple.

Il est bien évident alors, compte tenu que les moyennes des nombres de coupure SS et S*S duaux l’un de l’autre, d’une même présentation, sont bien définies, que les nombres de nouage de deux changements de présentations différents entre les deux mêmes présentations données, sont égaux termes à termes.

Invariance du nombre de nouage entre deux présentations données

Soit deux présentations S1 et S2 liées par deux changements de présentations $ et $’, de chiffrages respectifs s et s’, alors leurs nombres de nouage respectifs sont égaux :

Ns = Ns’

N*s = N*s’

Nous concluons de ce chiffrage une considération très générale qui dit qu’une présentation S1 d’un enlacement représente une série $ de mouvement pour une autre présentation S2 du même enlacement. Formulation que nous résumons dans l’expression :

S1 ® S2

$

et qui va nous servir à traiter des nouages dans leur relation au non-nœud prototype des enlacements de un à trois ronds que nous avons énumérés au chapitre précédent dans la partie consacrée à la plasticité nodale. Nous généraliserons par la suite ces résultats à la théorie des enlacements de quatre ronds et plus.

1. Interprétation de SS

Nous parlerons du nombre de nouage Ns et du nombre de nouage dual N*s d’une présentation S d’un nœud ou d’une chaîne, pour r £ 3, comme les nombres de nouage duaux l’un de l’autre d’un quelconque changement de présentation qui transforme le non-nœud S0 contenu dans ce nœud ou cette chaîne en cette présentation S :

Ns = SSS0

N*s = S*SS*0

sachant que S*0 = – S0 comme nous venons de le rappeler.

Nous pouvons ainsi interpréter la moyenne des nombres de la coupure d’une présentation et son nombre dual, par les formules :

SS = b + 2h + t + 2g + S0

S*S = – b* – 2h* – t – 2g + S*0

s = {b, b*, t, g, h, h*} est le chiffrage d’un quelconque changement de présentation qui transforme S0 en S.

Chiffrage de notre exemple

Montrons-le toujours sur le même exemple :

 fig6-91.gif (44489 octets)Fig. 91

Si nous considérons la série de l’exemple précédent inversée,

$ : S0 ® S

nous pouvons établir l’ensemble s de ses chiffres qui séparent et relient ces deux figures, en reprenant la série à rebours, soit en marquant les signes opposés :

s = { b, b*, t, g, h, h*} = {+1, 0, +4, –2, 0, 0}

Nous connaissons déjà les moyennes respectives des nombres de la coupure :

SS = – 2, S*S = +3, S0 = – 3, S*0 = + 3

et les nombres de nouage de $ ou de S à une opposition des signes près :

Ns = +1, N*s = 0

Nous allons cette fois de S0 à S, contrairement au calcul précédent où nous allions de S1 = S à S2 = S0.

Ce calcul inversé donne les formules permettant d’écrire :

SS = Ns + S0 = + 1 + (– 3) = – 2

S*S = N*s + S*0 = 0 + (+ 3) = +3

soit avec plus de précision, en se référant à l’ensemble s des chiffres de la série qui mène de S0 à S les deux formules :

SS = b + t + 2 (g + h) + S0 = +1 + 4 + 2 (–2 + 0) + (–3) = – 2

S*S = – b* – t – 2 (g + h*) + S*0 = 0 – (+4) – 2 (–2 + 0) + 3 = +3

2. Partie nœud, partie nouage et partie non-nœud

a1 - Partie nœud et partie non-nœud

Dans une présentation quelconque d’un nœud ou d’une chaîne orientée par un coloriage, nous pouvons respectivement associer un nombre de croisements qui les caractérisent aux parties nœuds (parties où passe la coupure) et aux parties non-nœuds (parties où ne passe pas la coupure).

À la partie nœud, le nombre de la coupure kiS.

À la partie non-nœud, le nombre de la coupure dans le dual k*iS.

Nous connaissons, par le corollaire principal de notre chapitre précédent, l’expression de ces nombres qui rend compte du mouvement de la coupure au travers des différents coloriages d’une même présentation :

kiS = SSSi

k*iS = S*SSi

Sur notre exemple :

fig6-92.gif (42897 octets)Fig. 92

Nous avons déjà vérifié ces formules à l’occasion des différents coloriages, dans le cas où celui-ci avait pour valeur Si = –3, et nous avions calculé : SS = –2, pour vérifier un peu plus loin que kiS = +1, soit :

kiS = SSSi,

comme le proposait notre corollaire principal. Nous pouvons faire le même calcul dans le dual où :

k*iS = +6 et S*S = +3

vérifiant ainsi que : k*iS = S*SSi = +3 – (–3) = + 6.

Or nous venons d’exprimer les moyennes en fonction des nombres de nouage, duaux l’un de l’autre, et du nombre d’enlacement indépendant du coloriage :

SS = Ns + S0

S*S = N*s + S*0

Ainsi la partie nœud et la partie non-nœud peuvent être exprimées en fonction des nombres de nouage :

kiS = Ns + S0Si

k*iS = N*s + S*0Si

Or, ce qui est vérifié par le nombre de la coupure d’une présentation quelconque, l’est aussi de nos non-nœuds standard. Soit, si nous appelons ki0 et k*i0 les coupures duales l’une de l’autre de ces non-nœuds, à l’occasion de différents coloriages i :

ki0 = S0Si

k*i0 = S*0Si

Ceci nous donne par conséquent l’expression de la partie nœud et de la partie non-nœud en fonction des nouages et de coupures éventuelles du non-nœud contenu :

kiS = Ns + ki0

k*iS = N*s + k*i0

Reprenons notre exemple, dans l’orientation i = 1. Nous calculons kiS = –3 et k*iS = +2.

Or nous savons que Ns = +1 et N*s = 0,

fig6-93.gif (51915 octets)Fig. 93

kiS = Ns + ki0 soit –3 = + 1 – 4

et k*iS = N*s + k*i0 soit + 2 = 0 + 2

a2 - Partie nouage, partie non-nœud et partie Lacan

Comme nous avons choisi les non-nœuds de telle manière qu’ils aient une présentation sans coupure, il existe bien un coloriage i = 0 pour lequel ki0 = k00 = 0, et par conséquent k*00= – c0.

Dans notre exemple, l’orientation i = 0 donne la coupure k0S = +1 et dans le non-nœud contenu k00 = 0, puisqu’il n’y a pas de coupure :

fig6-94.gif (48843 octets)Fig. 94

Par conséquent, nous sommes assurés qu’il existe un coloriage i = 0, tel que pour une présentation quelconque, sa partie nœud soit :

k0S = Ns

Nous l’appellerons la partie nouage de la présentation donnée, c’est sa partie coupure dans le coloriage i = 0.

D’où l’explication de notre choix d’appeler partie nœud la partie où passe la coupure, notre intuition de départ n’était pas mauvaise puisque nous pouvons l’étayer sur l’existence de ce coloriage i =0, auquel cas elle correspond à la partie nouage. Le point à souligner reste que le nombre de mouvements gordiens qui chiffre le nœud, est seulement contenu dans ce nombre de nouage mais ne lui est pas identique.

Dans notre exemple, en effet : k0S = +1 et Ns = +1.

La partie où ne passe pas la coupure, correspondante à la partie nouage, vaut :

k*0S = N*sc0

Nous l’appellerons la partie non-nœud de la présentation donnée, c’est sa partie où ne passe pas la coupure dans le coloriage i = 0.

La partie non-nœud contient donc une partie correspondante au nombre de nouage dual N*s que nous appellerons la partie Lacan, en référence à ce que nous avons appelé nœuds de Lacan, et le non-nœud contenu dans la chaîne que nous appellerons partie enlacement.

Dans les chaînœuds purement impropres, la partie nouage et la partie Lacan sont opposées (b = b* = h = h* = 0).

La présence de croisements propres peut rendre dissymétrique la partie nouage de la partie Lacan (b b* et h € h*).

Dans les nœuds propres, la partie non-nœud se réduit à la partie Lacan (k0 = 0).

Ces calculs établissent la terminologie que nous avons adoptée lorsque nous parlons de la partie nœud et de la partie non-nœud d’un nœud ou d’une chaîne, moyennant la précision nouvelle qu’ils apportent du fait de distinguer comme partie nouage la plus petite partie nœud, i = 0, susceptible d’être isolée parmi les coloriages.

Ainsi la variation de la coupure est tributaire de l’enlacement du fait de ses répartitions étudiées précédemment.

Maintenant, le mouvement de la coupure suit le nouage au travers des mouvements étudiés à présent.

Dans les cas alternés, le nouage non nul révèle le nœud que nous voulons encore préciser par la suite, en tant qu’il nous assure de l’effectuation de mouvements gordiens et d’homotopies. Nous résumons ce fait dans notre formule qui dit que le nœud est un accomplissement de coupure dans nos dessins, qui sont à lire dans la mesure où nous retrouvons la trace du nouage et du non-nœud contenu, particulièrement dans les cas alternés.

Reprenons le même dessin en indiquant par des lettres a, b et g, les types de croisements respectifs des ronds JS, JT et ST.

fig6-95.gif (55198 octets)Fig. 95

Où l’on voit que la partie non-nœud de la chaîne S présente bien les six croisements respectifs du non-nœud contenu dans cette chaîne, auxquels s’ajoutent des croisements de chaque type constituant la partie Lacan, sur laquelle il sera nécessaire de revenir. La partie nouage correspond bien à la partie nœud, à la coupure dans cette orientation minimum, k0S = Ns = –3.

3. Exercices

e1 - Graphe de Terrasson, partie nœud et partie non-nœud

Voici un nœud et son graphe de Terrasson :

fig6-a.gif (37101 octets)Fig. a

Nous proposons de ne retenir du graphe de Terrasson que le sous-graphe qui sépare la partie nœud de la partie non-nœud.

Effectuez le même exercice pour les trois dessins de nœuds suivants :

fig6-b.gif (28999 octets)Fig. b

e2 - Ouverture des poinçons, dans les deux modes de composition

Il y a une composition transverse qui s’appuie sur une portion du graphe de Terrasson, dont le point médian est un point de plein.

. fig6-c.gif (17439 octets)Fig. c

Il y a la composition en dérivation s’appuyant sur une portion du graphe de Terrasson, dont le point médian est un point de vide.

fig6-d.gif (29882 octets)Fig. d

Ouvrons les poinçons suivants :

fig6-e.gif (43135 octets)Fig. e

e3 - Composition des sources et du matériel du nœud

Nous prenons des poinçons ouverts dans l’exercice précédent pour recomposer des nœuds et des chaînes.

Que donne la composition de ces deux parties :

fig6-f.gif (11935 octets)Fig. f

C’est une composition régulière, les parties sont sans sections transverses.

Même exercice avec ces deux éléments dont il faut ouvrir les poinçons.

fig6-g.gif (29099 octets)Fig. g

Remarquons que la partie non-nœud est non régulière, elle est déjà un peigne coupé.

Puis, faisons le même exercice avec ces deux éléments suivants :

fig6-h.gif (39047 octets)Fig. h

Ceci est un montage régulier qui donne une chaîne de Slade.

Comment composer le borroméen à partir du 3-trèfle. Il s’agit d’une composition différente de celle du nœud 63?

Comment composer la chaîne de Whitehead à partir du 3-trèfle et de l’enlacement?

e4 - L’objet petit a aux Chinois

Nous connaissons le diagramme chinois issu de la tradition taoïste.

fig6-i.gif (11183 octets)Fig. i

Si nous considérons ce schéma tracé sur une sphère, nous pouvons le compléter en faisant voir dans une mise à plat de la sphère trouée la partie cachée au regard.

fig6-j.gif (30783 octets)Fig. j

Ce sont trois ronds posés sur le plan. Lorsque, dans une promenade sur ce plan, un rond est franchi, nous passons d’une zone pleine à une zone vide, ou inversement d’une zone vide à une zone pleine. Il importe de changer de qualité de zone lorsqu’un rond est franchi. Nous pouvons accumuler les ronds sans jamais les faire se rencontrer. Dans cet exercice, il n’y a pas de croisements.

Nous avons tracé le T-graphe qui structure, comme nous l’étudions dans cet exercice, cette configuration élémentaire.

Une quelconque configuration :

fig6-k.gif (42228 octets)Fig. k

Elle peut être décomposée par un tel graphe, graphe de Terrasson, en des pièces de deux types, et de deux types seulement.

Nous les appelons poinçons.

fig6-l.gif (18289 octets)Fig. l

Les poinçons sont composés en collant deux arêtes de leur graphe qui fait bord :

fig6-m.gif (28035 octets)Fig. m

La composition de deux poinçons donne un nouveau poinçon généralisé.

Il faut ajouter un fermeur à cette conjonction de poinçons pour obtenir une configuration du type proposé.

fig6-n.gif (23739 octets) Fig. n

Question : Comment trouver le graphe de Terrasson qui décompose la configuration donnée dans le cas d’une configuration quelconque de ronds.

Méthode : Commencez par prendre le problème par les deux bouts.

a — Essayer de décomposer des configurations de plus en plus complexes, en partant des plus simples.

a’ — S’exercer à composer des poinçons (a) et (a’) dans toutes les directions du plan.

Solution de l’exercice portant sur l’objet petit a aux Chinois

fig6-o.gif (100481 octets)Fig. o

Il suffit de placer un point dans chaque zone (de plein ou de vide) qui ne contient pas d’autre zone, et deux points pour chaque zone contenant d’autres zones. Il s’agit alors de relier par des arêtes ces sommets de pleins et de vides pour constituer le graphe de Terrasson qui décompose une quelconque configuration de ronds.

Remarque : La composition par les pleins de deux poinçons (a) ajoute un rond de plein.

fig6-p.gif (12416 octets)Fig. p

Par contre, la composition par les vides de deux poinçons (a’) ajoute un rond de vide.

fig6-q.gif (13944 octets)Fig. q

Pour réaliser la solution dans l’exercice proposé, il est plus simple de dessiner la configuration des ronds en suivant les deux directions du plan.

Les ronds des zones pleines sont dessinés successivement de gauche à droite, et les ronds de zones vides de haut en bas de la feuille. De même, en suivant ce principe, les points de pleins du graphe seront placés de façon horizontale, alors que les points de vides seront alignés verticalement.

fig6-r.gif (92413 octets)Fig. r

En s’appuyant sur ces points, les arêtes sont tracées de telle manière à joindre un point de plein à un point de vide qui ne sont séparés que par un rond, afin de former les deux types de poinçons (a) et (a’), avec à l’extérieur le poinçon fermeur F.


© 1999 Topologie En Extension . Tous droits de reproduction et de représentation réservés. Tous les textes, dessins et graphiques reproduits dans cet ouvrage sont protégés par des droits de propriété intellectuelle détenus par Topologie En Extension. Par conséquent, aucun de ces éléments ne peut être reproduit, modifié, transmis, rediffusé, traduit, vendu, exploité commercialement ou réutilisé de quelque manière que ce soit sans l'accord préalable écrit de Topologie En Extension.